La Dombes
Bon pisqu'c'est Dimanche, j'vais t'raconter une histoire. Mais une vraie de vraie. Ben un coup, c'était un long Ouiquinde, et on avait décidé de partir avec le CC. Comme tous les vendredis de départ, ma Jonquille charge le CC pendant la matinée. Je rentre en fin d'mat, liquide deux ou trois p'tits trucs, pis j'bâche ma semaine de travail. Repas, vaisselle, derniers trucs à charger et hop la glisse, on tourne la clé de contact.
But du Ouiquinde, la Dombes. C'est merveilleux la Dombes, ses étangs avec ses grosses carpes. On adore c'te région et on y va assez souvent c'est pas très loin. On plante le camp vers seize heures, et hop relax à nous la liberté des grands espaces.
Le samedi on s'en va passer la journée au Parc des Z'oiseaux. Endroit magnifique qu'on a visité plusieurs fois toujours avec le même plaisir. Si t'as jamais passé par là, ce sera un manquement dans ta vie, c'est moi qui t'l'assure. On commence la journée en prenant le p'tit train qui serpente, debleu quel beau mot, dans les allées. Puis on va bâfrer au resto. L'aprême on refait le tour à pedibus, on admire les zoizos de chaque enclos. On a du plaisir et tout est propre en ordre qu'on se croirait en Bourbinie. Soirée calmos, l’cul sur une chaise et une cannette à la main. Mais on a deux mains.
Le gris du Gabon. A droite hein !
Dimanche matin, on s’rend au bord d’l’étang. On est pécheur, mais pas mordu à donf. Tiens que se passe-t-il donc là ? Qu’on s’interrogationne. Oh mais c’est un concours, chic alors. On z’yeute un moment en tournant autour de l’étang, car on a jamais pu faire tourner l’étang autour de nous, même s’y on fait tourner les tables. Entre deux mecs, y a un trou. Un grand trou marqué 153 et 154. Y a personne là ? Qu’apostrophais-je le pécheur N° 152. Ben non mes deux copains ont eu un empêchement majeur, Bobonne leur a interdit de v’nir. Pourrait-on s’y installer, apourpointais-je ? Ch’sais pas, faudrait p’têtre voir l’Président qu’est là bas avec un pull vert.
Après avoir salué l’Président enverdé, on expose notre projet. Ben ch’sais pas qui rétorque, faudrait voir l’Président du Comité, moi ch’suis l’Président du Jury. Jour M’sieur l’Président du Comité, que l’apostrophais-je. Ma Jonquille et moi-même qui vous causons présentement aimerions participer à votre sublime concours, aux emplacements N° 153 et 154 restés vacants par l’absence de la présence des deux concurrents.
On dépose notre matos entre les gars voisins. Oh on a pas du matériel sophistiqué comme eux, mais tout de même pas des branches de noisetier avec une ficelle. Nos voisins se font des signes d’intelligence totalement inintelligents. Je lance une poignée d’appâts à l’eau, et aussitôt ça mouche. On jette nos fils au large et la minute suivante ma Jonquille relève une belle carpe. Quelques secondes plus tard je me bats avec un monstre d’au moins trois livres. On met soigneusement notre poiscaille dans une bassine d’eau. Les mines de nos voisins sont revenues sérieuses.
Et toute la matinée, on sort carpe l’une après l’autre. Les gars d’à côté font la gueule. Trois plombes plus tard, dégoûtés y jettent l’éponge, et nous on lève, on lève. Enfin le coup d’sifflet final. Des p’tits gars se figent à nos côtés pour vérifier qu’on ne continue pas de taquiner l’goujon. On leur distribue du bon chocolat au lait des Alpes. Tiens au fait t’as d’jà vu de l’herbe sur les Alpes ? Plus tard, le Comité du Jury se pointe avec carnets, calepins et balance. Les mecs ont le teint blafard et même verdâtre en voyant nos prises. Le comptage et la pesée commence. Il faudra remettre toute la poiscaille à la baille une fois dument pesée, homologuée et enregistrée. On signe le registre.
Avec un sourire tout miel ma Jonquille sollicite gentiment et poliment l’autorisation de garder une carpe moyenne qu’elle apprêtera selon une vieille recette de famille transmise de Mère en Fille. Pas fou l’mec lui en mets quatre ou cinq de côté en demandant à c’que l’lui et ses collègues puissent goûter. Le soir, une grande tablée se régale. Attirés, comme les mouches par le miel, des collègues pécheurs rappliquent au galop.
En conseil esstraordinaire, il est décrété :
- Que demain Lundi, une patrouille formée des six meilleurs éléments sortiront des carpes de la bâille
- Que des épouses pécheresses, mais aussi pêcheresses, seraient astreintes aux travaux culinaires sous les ordres de ma Jonquille.
- Que dix hommes monteront des tables et bancs et horreurs suprêmes, devront dresser correctement les dites tables.
Jonquille, tablier blanc sur le ventre, dirige d’une main de fer dans un gant de cuisine, la cuisine. Elle goûte les pâtes à friture, fait rajouter ceci ou cela. Contrôle la température des friteuses. Surveille l’épaisseur de la découpe des darnes de carpe. H-IL boit l’apéro avec les Présidents.
Bientôt, tout l’monde se régale des darnes de carpe à la friture et de la sauce mayo. Faut dire que le secret réside dans la pâte à friture et la mayo. Et soudain, pendant le repas, le Président du Jury d’une voix forte me demande le secret de nos appâts. Ben Président, lui répondis-je, un secret est un secret. Ouais mais ! Objecta-t-il, nous vous avons accueillis les bras ouverts, et de plus vous nous avez foutus la pâtée. La Honte est sur nous à tout jamais. Calmos Président ! J’vais t’le révéler c’foutu secret, enfin partiellement. Chez moi, j’ai un copain qui s’nomme Moïse, et son oncle est Rabbin. Alors y m’met d’côté les prépuces, et c’est avec les prépuces qu’on appâte.
Et mardi on se retrouve sur l'Jaune
Mais H-IL te l'souhaite tout bon c'Dim
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